Cancer du sein et tests génomiques Une enquête de Patients en réseau

REPORTAGE - Laure GUEROULT ACCOLAS, Patients en réseau - Marylène MENORET - Dr Daniel ZARCA, Chirurgien oncologue, Président de l'Institut Français du Sein

L’association Patients en Réseau publie les résultats d’une enquête réalisée auprès de 625 femmes soignées pour un cancer du sein sur leur connaissance des tests génomiques.

« La réponse de la signature génomique a été sans appel : à mon stade, la chimiothérapie était inutile », Marylène Menoret

« Les tests génomiques permettent à des femmes qui ont un cancer du sein hormono-dépendant, HER2-, d’éviter une chimiothérapie parce qu’elle est inutile dans leur situation. Lorsqu’on est malade aujourd’hui, dans le contexte actuel de l’épidémie de Covid-19, la chimiothérapie a un impact sur l’immunité, elle est un risque supplémentaire important. Il nous semble essentiel que les femmes connaissent mieux ces tests et que les médecins les proposent aux patientes concernées », alerte Laure Guéroult Accolas, fondatrice de l’association Patients en Réseau - Mon Réseau Cancer du Sein qui a réalisé une enquête, avec le soutien institutionnel d’Exact Sciences, sur la connaissance des tests génomiques auprès de 625 femmes soignées pour un cancer du sein. 

Un manque important d’information des patientes
L’enquête met en évidence un manque de connaissance sur les tests génomiques, bien souvent confondus, pour 81% des femmes interrogées, avec les tests génétiques. « 64% d’entre elles n’ont jamais entendu parler des tests génomiques. Les 12% des femmes qui ont bénéficié de l’un des tests actuellement disponibles sur le marché estiment que l’information reçue est claire et rassurante quant à la décision du traitement », indique Laure Guéroult Accolas. Plus d’un tiers des patientes se sont en effet rendu compte en participant à l’enquête qu’elles n’étaient pas concernées par ce type de test. Cependant, 63 % d’entre elles avaient un cancer du sein hormonodépendant qui aurait pu justifier leur prescription. Les cancers du sein HER2+ et triple négatif nécessitant une prise en charge spécifique, un test génomique n’est pas indiqué (37 % des répondantes).

Au moins 6 000 femmes en France pourraient chaque année éviter une chimiothérapie inutile
« Les tests génomiques analysent l’expression des gènes d’une tumeur afin de connaître son agressivité et de permettre dans un certain nombre de cas, en particulier dans les cancers du sein, d’identifier les patientes qui vont vraiment bénéficier d’une chimiothérapie et celles qui pourraient s’en passer et ainsi d’éviter de très nombreuses chimiothérapies inutiles », souligne le Dr Daniel Zarca, chirurgien oncologue, président de l’Institut Français du Sein. Parmi les 389 patientes éligibles aux tests génomiques (63%), 88 % d’entre elles n’ont pas eu de proposition de ce test par leur médecin. « 60 à 70 % des patientes atteintes d’un cancer du sein qui ont des récepteurs hormonaux positifs et qui n’expriment pas HER2- sont concernées par ces tests, soit environ 35 000 patientes chaque année en France. Pour que les patientes non ménopausées puissent y avoir recours, les ganglions ne doivent pas être envahis. Cependant, pour les patientes ménopausées sans envahissement ganglionnaire, on peut et on doit utiliser le test, même si 1 à 3 ganglions sont touchés. A l'Institut Français du Sein, nous utilisons un test* pour lequel nous avons toutes les preuves d'efficacité et qui est également le test qui évite le plus de chimiothérapies inutiles. S’il était utilisé dans les indications retenues, au moins 6 000 femmes en France pourraient chaque année échapper à une chimiothérapie. »

Dans mon cas, la réponse de la signature génomique a été sans appel, la chimiothérapie était inutile 
« En mai 2020, j’ai été diagnostiquée d’un nouveau cancer hormonodépendant - stade 2 »
, témoigne Marylène Menoret.« J’ai échangé avec un chirurgien oncologue sur les tests génomiques dont j’avais entendu parler dans les médias. Depuis mon premier cancer, j’ai toujours suivi les actualités sur l’évolution des traitements du cancer du sein. J’étais très intéressée surtout lorsque j’ai appris qu’une femme sur trois pouvait avoir de la chimiothérapie sans que son utilité soit avérée. Il était impensable pour moi de ne pas entreprendre cette démarche. La tumeur que l’on m’avait prélevée lors de mon intervention chirurgicale a été transférée au laboratoire. La réponse de la signature génomique* a été sans appel : à mon stade, la chimiothérapie était inutile. J’ai donc suivi mes séances de radiothérapie qui se sont très bien passées et entamé mon traitement d’hormonothérapie début novembre 2020. Aujourd’hui, je suis en pleine forme. »

Les soignants, la presse, Internet et les associations de patients, principales sources d’information
36 % des femmes qui ont déclaré avoir connaissance des tests génomiques en ont été informées par leur équipe soignante (55 %), majoritairement par leur oncologue (47 %), mais aussi parleur gynécologue (7 %). Elles ont également recherché des informations dans la presse ou sur Internet (19 %) et auprès des associations de patients (11 %). 84 % des patientes restent toutefois en attente de plus d’informations sur les tests génomiques et 76 % des patientes non informées auraient souhaité recevoir une brochure d’information. « Les associations diffusent une information précise, généralement coconstruite et sourcée. On voit bien que la médecine est de plus en plus personnalisée, de plus en plus technique. Il faut trouver des moyens de donner aux patientes une information plus claire et accessible afin qu’elles connaissent mieux ces tests et qu’elles sachent à qui ils s’adressent. Notre association a développé un dossier d’information sur le site Internet Mon réseau cancer du sein   afin que les patientes qui entendent parler des tests génomiques trouvent facilement toutes les ressources nécessaires », précise Laure Guéroult Accolas. 

Bien s’informer sur les tests génomiques avant même de consulter
« Je dirais à une femme à qui on annonce qu’elle doit démarrer une chimiothérapie de chercher à comprendre la typologie de son cancer. Il doit y avoir un moment où la question peut être posée concernant la nécessité d’une chimiothérapie. L’ayant vécu moi-même, cela en vautvraiment la peine. Le test génomique a clairement validé, dans mon cas, l’inutilité de la chimiothérapie. D’autres femmes peuvent se retrouver un jour dans la même situation que moi. Alors, informez-vous, interrogez-vous, parlez-en autour de vous et à votre oncologue », recommande Marylène Menoret. « Chaque année, en France, jusqu’à 6 000 patientes pourraient ainsi avoir de meilleures chances de prise en charge de leur maladie sans souffrir d’un traitement de chimiothérapie, très lourd dans son impact physique et dans la vie personnelle et professionnelle », insiste Laure Guéroult Accolas. « La finalité du test génomique nécessite vraiment que toutes les femmes sachent - avant même de consulter - que ce test existe et qu’elles peuvent en bénéficier. Avant même de débuter le traitement, je dirais à une patiente qu’il est important pour elle de s’informer. Elle ne doit pas hésiter à poser ses questions à son oncologue ou à son chirurgien, il n’y a rien d’indiscret à cela, et ensuite, se faire une opinion par elle-même », conclut le docteur Daniel Zarca.

*Oncotype DX


Les tests génomiques sont actuellement financés en France pour les patientes présentant un cancer hormonodépendant de grade intermédiaire, sans envahissement ganglionnaire, et dont la taille tumorale est comprise entre 1 cm et 5 cm. Source HAS. - Le test génomique consiste en un prélèvement sur la tumeur après l’intervention chirurgicale. Le test génétique est un simple prélèvement sanguin qui, une fois analysé, permet de connaître les prédispositions familiales à certaines tumeurs.

Interview réalisée par Acteurs de santé Tv, avec le soutien d’Exact Sciences qui n’est pas intervenu dans le contenu éditorial - dans le cadre de l’enquête menée par Patients en Réseau auprès de 625 femmes soignées d’un cancer du sein, du 2 au 16 janvier 2021.

En savoir plus : 
• Mon Réseau Cancer du Sein, https://www.monreseau-cancerdusein.com/ - Dossier d’information en ligne sur les tests génomiques, bit.ly/testgenomique  • Patients en reseau, https://www.patientsenreseau.fr/ @reseauKsein @reseauKgyneco @reseauKpoumon @reseauKcolorect• Dr Daniel Zarca, https://www.linkedin.com/in/daniel-zarca-291a4389/, liens d'intérêt sur https://www.transparence.sante.gouv.fr/flow/main?execution=e2s1 - Institut Français du Sein, https://www.ifsein.com• Mon traitement cancer du sein, https://www.montraitement-cancerdusein.fr/• Exact Sciences, https://www.exactsciences.com/

Sources :
https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Les-chiffres-du-cancer-en-France/Epidemiologie-des-cancers/Les-cancers-les-plus-frequents/Cancer-du-sein - NCCN Guidelines Insights: Breast Cancer, version 3.2018 - IQWIG Communiqué de presse, septembre 2018 - Sparano et al. N Engl J Med 2018 - Geyer et al. npj Breast Cancer 2018 - Kalinsky et al, San Antonio Breast Cancer Symposium 2020 GS3-00

 

 

 

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