Le professeur Roman Rouzier a présenté lors de la conférence européenne sur le cancer du sein qui s’est tenue à Barcelone, une étude inédite sur les bénéfices réalisés en prescrivant un test génomique le plus tôt possible à des femmes diagnostiquées d'un cancer du sein en stade précoce.
Nous ne savons pas toujours réellement s'il y a un intérêt à faire une chimiothérapie
« Nous venons effectivement de présenter lors de la Conférence européenne du cancer du sein une étude dans laquelle nous avons étudié les bénéfices d’un changement de stratégie de prise en charge des patientes atteintes de ce cancer. Actuellement, la majorité des patientes - 4 femmes sur 5 - qui ont un cancer du sein vont être d’emblée opérées. Se pose alors la question de prescrire des traitements préventifs tels que la chimiothérapie. Les arguments pour faire ou ne pas faire une chimiothérapie sont liés à la taille de la tumeur, à l’envahissement des ganglions et à la biologie de la tumeur, c'est-à-dire une évaluation simplifiée de sa carte d'identité moléculaire. Mais même lorsque nous possédons toutes ces informations, persiste une « zone grise » dans laquelle nous ne savons pas s'il y a réellement un intérêt à faire une chimiothérapie. »
Faire moins de chimiothérapies engendre des bénéfices
« Nous disposons depuis quelques années de tests génomiques qui permettent d’analyser plus précisément la tumeur, de déterminer plus précisément son profil moléculaire et de confirmer l’intérêt de faire une chimiothérapie. Évidemment, il s’agit d’une nouvelle stratégie et celle-ci, comme toute innovation, a un coût qu’il faut savoir contrebalancer : faire moins de chimiothérapies engendre des bénéfices en réduisant les coûts de prise en charge, mais évite aussi à la patiente un certain nombre d’effets secondaires. L’objet de l’étude que nous avons menée était d’analyser la balance entre le coût et les bénéfices. Cette étude de modélisation repose sur plusieurs études à grande échelle, dont deux études randomisées réalisées à partir du test génomique Oncotype DX® proposé par Exact Sciences. Dans ces études randomisées, certaines patientes en « zone grise » recevaient un test et d’autres non. L’objet était d’analyser à terme si le fait de définir des groupes à risque permettait de mieux préciser les indications de chimiothérapie. »
Le test génomique Oncotype DX® nous permet de mieux prendre en charge nos patientes
« Ces deux grandes études internationales menées avec maintenant cinq et douze ans de recul nous ont permis de démontrer qu'il y a un intérêt à utiliser cette signature car elle nous permet de mieux prendre en charge nos patientes. De nombreuses patientes françaises y participaient et notre travail a consisté à transposer ces études internationales à la France : nous avons réactualisé les données en termes de nombre de patientes de moins de 50 ans et de plus de 50 ans atteintes d’un cancer du sein, et tenu compte du pourcentage de patientes ayant un envahissement ganglionnaire pour modéliser les coûts et les bénéfices dans notre pays. Cela nous a permis d’obtenir des chiffres extrêmement précis à l'échelle de la France pour, avant tout bien conseiller les patientes mais aussi pour apporter aux autorités de santé des informations sur l'impact de la stratégie de faire un test génomique : combien cela coûte et combien cela rapporte. »
Le coût des tests génomiques est largement couvert par le nombre de chimiothérapies évitées
« Une chimiothérapie va coûter aux alentours de 12.000 € et un test, aux alentours de 2.000 €. Chaque année, des négociations sont effectuées entre le coût de la chimiothérapie et celui des tests. Il faut simplement modéliser : si nous faisons un test et que nous évitons une chimiothérapie, effectivement le test a un coût mais nous avons non seulement économisé le coût d’une chimiothérapie, mais aussi évité ses effets secondaires potentiels. Avec cette stratégie, nous allons éviter une leucémie sur deux, une insuffisance cardiaque sur deux. Quand on a une chimiothérapie, on s'arrête de travailler beaucoup plus longtemps que quand on n'en a pas. Il y a beaucoup plus d'arrêts de travail. Or, nous ne pouvons aujourd’hui modéliser le tout, mais cela se fait au bénéfice des patientes atteintes d'un cancer du sein et aussi de la sécurité sociale. Ce travail démontre que le modèle est dominant : lorsqu’une patiente a été opérée et se trouve dans la « zone grise », réaliser un test génomique permettant de confirmer s'il y a un intérêt à faire ou non une chimiothérapie, permet in fine d’économiser de l'argent car le coût des tests est largement couvert par le nombre de chimiothérapies qui sont évitées. »
Interview réalisée par Acteurs de santé Tv, avec le soutien d’Exact Sciences qui n’est pas intervenu dans le contenu éditorial.
En savoir plus :
- Centre François Baclesse, https://www.baclesse.fr
- Mon traitement cancer du sein, https://www.montraitement-cancerdusein.fr/
- Exact Sciences, https://www.exactsciences.com/
- Patients en réseau, https://www.patientsenreseau.fr/